Briançon, Montdauphin, Fort Queyras, Saint-Véran : quatre jours dans les Hautes Alpes en été

26 sept. 2020




Le moins qu'on puisse dire, c'est que cet été n'aura clairement pas ressemblé aux autres. Imprévisible et restreinte, cette saison 2020, avec bien-sûr son arrière gout de covid-19 bien présent en bouche. Il aura fallu renoncer aux voyages à l'étranger, mes bulles d'oxygène estivales. Et ce ne fut pas une concession si anodine, pour moi, en tous cas. Alors, comme beaucoup de monde je crois, je me suis inscris cette année dans cette démarche un peu "contre mauvaise fortune bon coeur", celle du #cetétéjevisitelafrance. Ça tombait assez bien finalement, je me disais, encore une fois comme beaucoup de monde, que je ne la connais pas si bien que ça, la France.

J'ai essayé de ne pas trop m'accrocher à l'idée de vacances, le confinement pouvant d'un jour à l'autre frapper de nouveau à nos portes, d'autant plus qu'ici en Provence, une des zones touristiques les plus prisées de France, il se murmure qu'on n'y coupera pas au re-confinement, en août ou en septembre. 
Chez moi, on a cette chance de toujours avoir cette option dans un coin de nos têtes, cet indéboulonable quoi qu'il arrive : on sait qu'on peut toujours facilement changer d'air, aller passer un moment dans nos pieds à terre de campagne, l'un au coeur du Luberon, Vaucluse et l'autre au coeur du Champsaur, Hautes Alpes. Pour autant, on avait envie d'autre chose cette fois-ci, envie de (re)découvrir ces noms dont mon grand-père nous parlait tant, ces noms qu'on a si souvent croisés sur les panneaux, mais qu'on connait moins, voir pas du tout, finalement.

Pour ces quatre jours de vacances, nous avons donc opté pour les Hautes Alpes, mais ces autres Hautes Alpes, l'autre versant du Champsaur, par delà Les Écrins, cette région de l'autre côté de la montagne, qu'on ignore toujours au profit de l'autre. C'était très ambitieux. Quatre jours pour faire tout ça, ce n'est clairement pas assez. Mais les circonstances (comprendre : ma cheville algodystrophiée) nous amputaient des nombreuses randonnées, activités principales à vivre et à faire dans les Hautes-Alpes, ce paradis des gens très sportifs et des amoureux de la nature.

L'été dans les Alpes, j'y ai eu droit toute mon enfance. Dans les années 90, en camping, caravane avec mes grands-parents, tente avec mes parents. Deux, trois semaines de plein air, qui m'ont laissé quelques bons souvenirs, mais déjà, mes préférences se lisaient ailleurs. Clairement, je suis une fille de la ville, mes enchantements se situent plutôt du côté des arts et de l'histoire. Pour autant, j'ai besoin de ces moments en pleine nature, que j'aime à chérir comme des trésors, inlassablement émerveillée par le vertige des montagnes. Alors, sans grand ordre, jetés le long d'un road trip assez chaotique, quelques instants gagnés au coeur de quelques uns des plus beaux endroits des Hautes-Alpes.



M É M O    P R A T I Q U E   

 combien de temps : trois jours pleins minimum, idéalement une semaine 
 où dormir : au fil de la route là où il y a de la place, en privilégiant les hôtels dans de jolies bâtisses ou chalets des montagnes
 comment y aller : en voiture, 3h / 3h30 depuis Marseille
 les transports : voiture obligatoire
 circonférence du lieu : immense avec de longs km à parcourir 
 attractivité : sublimes paysages, randonnées en haute montagne, loisirs sportifs en tous genres
 bonus : l'air pur des montagnes 




I T I N É R A I R E 


Jour 1 : départ de Marseille / lac de Serre Ponçon / Briançon / nuit à La-salle-les-alpes
Jour 2 : Le Col du Lautaret / Le col du Galibier / Vallouise / Montdauphin / nuit à Eygliers
Jour 3 : Eygliers / Fort Queyras / Saint-Véran / nuit à La chalp Saint-Véran
Jour 4 : Saint-Véran / Abriès / retour à Marseille



L E   L A C   D E 


Serre Ponçon est le plus grand lac des Alpes de Haute-Provence, situé à quelques kilomètres de Gap, la ville chef-lieu du département. Assez accessible depuis Marseille, il est aussi la porte d'entrée de la route vers les paysages des grandes montagnes et glaciers aux neiges éternelles (or is it ?).

Avec sa couleur bleu aux reflets cobalt, il s'étend sur de nombreux kilomètres et offre tous un tas de possibilités, de loisirs sauvages ou aménagés et de points de vue à admirer. Il s'agit pourtant d'un lac artificiel, retenue d'eau d'un barrage EDF. Construit dans les années 60, il entraina la destruction de deux villages noyés sous les eaux, mais sauva la vallée du danger de ses crues : la Durance, la rivière nourricière de la Provence, aux enjeux importants dans une région régulièrement frappée de sécheresse, avait à plusieurs reprises inondé la vallée sous des torrents dévastateurs, années et siècles auparavant.

Serre-Ponçon en été n'a pas le panache du Serre-Ponçon d'hiver. Le lac aux sommets enneigés, à la quiétude sauvage, devient une base de loisir en été, où bateaux de plaisance et kayaks circulent en abondance. De nombreux camping peuplent ses rives et le tout concentre foule au bord du lac. Il est tout de même possible en cherchant bien de profiter d'un coin de calme et d'avoir ses berges pour soi tout seul.


Que faire autour du lac de Serre-Ponçon ? 


- prendre en photos le sublime îlot Saint Michel et sa chapelle miraculeusement rescapée des eaux
- pique niquer au bord de l'eau (par exemple sur la plage près de l'école de paddle Glisscool)
- visiter le Muséoscope du lac, pour en apprendre plus sur la riche histoire de Serre-Ponçon
- visiter l'Abbaye de Boscodon, charmante abbaye romane du 12ème siècle
- visiter Notre dame du Laus, sanctuaire dédié à la Vierge Marie, érigé là en raison de ses apparitions à une jeune bergère



Trois routes s'empruntent le long du lac.
Il y a d'abord la voie classique, par Chorges, qui trace jusqu'au fond de la vallée, rapide (enfin, ça va quoi) et efficace. Puis il y a l'autre voie, par Espinasse, plus longue qui serpente dans les hauteurs, depuis laquelle le point de vue sur le barrage est saisissant, avec ses airs du Mur de la garde de nuit de Game of Thrones et ses virages étroits en tête d'épingle. Les deux routes se rejoignent au bout d'un moment, le point divergent se situant juste au niveau du comptoir paysan "Le marché paysan Philip Michel" à Jarjayes, où un arrêt s'impose pour faire le plein en fruits et légumes locaux, cultivés en agriculture raisonnée. De l'autre côté du lac, sur son versant ouest, la route est rocailleuse, interminable et donne vraiment mal au coeur.




Première étape de la route vers les grands sommets, Serre-Ponçon, voie royale (mais surtout seule route) vers les grandes stations, est un lieu de passage où il n'est pas rare d'essuyer des embouteillages, qui peuvent s'étaler sur des heures, en été comme en hiver. Depuis Embrun jusqu'à Briançon, compter environ une petite heure de trajet.


Que faire le long de la route sans s'en éloigner ? 


- une visite d'Embrun, jolie ville au paysage alpin
- une nuit au château de Picomtal, jouer les nobles le temps d'une nuit dans un château Renaissance
- les sources chaudes du Plan de Phasy, une curiosité touristique vraiment au bord de la route
- une visite de Montdauphin, place forte édifiée par Vauban (cf plus bas)
- courte balade jusqu'à La fontaine prétrifiante de Reotier (cf plus bas)
- le rocher aux marmottes à Eyglier, parc très facile d'accès où observer des marmottes apprivoisées (cf plus bas)




Culminant à 1326 m d'altitude, Briançon est considérée comme la plus haute ville de France. Située tout au fond (ou presque) des Hautes Alpes, elle est sa deuxième plus grande ville et peut-être son pôle le plus attractif, relié au très fameux domaine skiable de Serre Chevalier,  dit "Serre-Che" pour les intimes.

Construite comme un fort défensif stratégique aux portes de l'Italie (dont la frontière n'est qu'à 15km),  capable de résister aux assauts du duché de Savoie, Briançon se déploie autour de son passé militaire, avec ses fortifications imaginées par Vauban, aujourd'hui inscrites au patrimoine de l'UNESCO.

L'originalité de la ville, c'est sa partition en deux axes, la ville haute et la ville basse. La ville basse est une ville moderne classique tandis que sur c'est sur la ville haute que se dresse la citadelle de Briançon.

Cité médiévale pleine de charme, enserrée dans ses remparts, Briançon se dresse clairement au sommet des sites touristiques incontournables des Hautes-Alpes. Pour ma part, j'ai trouvé la ville absolument sous-côtée. J'y voyais un nom barbant que j'entends depuis mon enfance avec un certain désintérêt. Personne ne m'avait expliqué que Briançon vaut vraiment le voyage.

Car Briançon est d'une beauté atypique, sans égal en France. D'abord, ses fortifications caractéristiques de l'ami Vauban, édifiées en forme d'étoile.
Et puis le délice de ses murs ocres, qui annoncent la Provence, même si loin de son épicentre. C'est vrai qu'on sent ce petit quelque chose d'italien à Briançon. Avec les deux tours baroques de sa collégiale, les montagnes à l'horizon, j'ai trouvé qu'elle avait un petit air de Munich. Tout à son identité propre, j'ai trouvé que Briançon se distingue aussi par son architecture typique des Alpes, finalement.

Le centre de la vieille ville est construit en pente, fatalement. Au prix d'un dénivelé assez conséquent, on déambule le long de délicieux petits axes estivaux, où petites échoppes et fontaines s'enchainent en file indienne, parsemées d'un flux ininterrompu de touristes. Briançon donne envie de ralentir le rythme, de savourer la vie une glace, de respirer le grand air, de promener ses yeux dans ses ornements.

Point de vue patrimoine historique, il y a de quoi s'en donner à coeur joie. Avec bien sûr son imposante collegiale aux airs de riche basilique italienne. Devoir enfiler un masque dans une petite église au plus haut des Alpes à 1326m si loin de la "civilisation", voilà qui nous aura bien plongés dans un fou-rire.

Tout au long des ramifications de la ville, on a vite fait de se perdre, tant les petites rues serpentent d'un bout à l'autre du grand axe. Ces petites rues sont d'ailleurs bien désertes, avec un bon nombre de vieille bâtisses abandonnées, ce qui fait partie du charme, bien sûr. On sent le poids d'un (riche) passé à Briançon plus qu'ailleurs dans les Alpes.

Au delà de ses échoppes pleines de gout qui font loucher les yeux, il y avait aussi son centre d'art contemporain FRAC, assez petit pour en rire, assez grand pour en pousser la porte et s'extasier sur une de ses dix oeuvres qui se courent après.

Briançon n'est pas bien grande. On en plutôt vite fait le tour, surtout avec une cheville qui empêche de partir explorer ses hauteurs, le pont d'Asfeld et ses autres forts qui coiffent ses hauteurs.

J'ai ragé, vraiment ragé de ne pas avoir pu monter au plus haut du fort, prise par le temps et empêchée par l'algodystrophie de ma cheville droite qui me pousse encore et toujours à l'économie de mes pas. Je me console en me disant que ce n'est que partie remise. Briançon fut une sorte de coup de coeur, je suis sûre que nous nous reverrons souvent, elle et moi.

Point culminant de la visite : prendre un café en terrasse sur les remparts, avec vue sur les montagnes à l'heure du coucher du soleil. Ohlalala, mais quel bel instant de vie. Je m'y serais prélassée des heures, à cet endroit.


Que faire à Briançon ?


- monter jusqu'en haut du fort
- déambuler dans les magasins et s'offrir une glace
- visiter la collégiale
- suivre le circuit de points d'intérêts proposé par l'office du tourisme
- descendre jusqu'au pont d'Asfeld
- boire un verre sur les remparts, au Panorama Café
- s'offrir une visite guidée de la ville ici
- faire un tour au salon de thé La muse gueule




c o u p   d e    c o e u r   d u   s é j o u r 

 
Pour une nuit, par le grand hasard de l'algorithme booking.com, nous avons atterrit dans un petit village à quelques minutes de Briançon, La-salle-les-Alpes. Situé en plein domaine de Serre Chevalier, La-salle-les-alpes a cette allure de station de ski estivale, plus haut de gamme que ces villages plus rustiques du côté du Champsaur. Ici, quelques petits magasins plein de gouts pavent les rues au travers d'une lignée de restaurants où les clients aiment à se regarder les uns les autres, histoire de savoir qui a fait un petit effort vestimentaire après la rando du jour ou qui s'est complètement laissé aller ce soir, tandis qu'on déguste un verre de vin au bord du torrent de la rivière.

Pour cette nuit, nous dormirons donc à La vieille ferme, un petit hôtel atypique avec vue sur les montagnes, installé dans une ferme rénovée du 18ème siècle. Meublé et pensé avec gout, entre lustre du passé et touche contemporaine, ses superbes chambres sous la mansarde disposent toutes d'un balcon en bois. On se délasse au choix, entre les murs d'un superbe bar, ou à ciel ouvert sur la terrasse, tandis que le petit déjeuner est servi sur des nappes rouges à carreaux dans une salle avec voûtes au style alpin des plus soignés. Petite particularité supplémentaire : l'hôtel est tenu par une équipe de suédois à fort accent, très sympathiques au demeurant. La vieille ferme, depuis sa jolie bâtisse ne se situe qu'à quelques minutes à pieds du centre ville où il n'y a plus qu'à choisir au sein d'un certain choix de bar et de restaurants tous plus agréables les uns que les autres.

103€ la nuitée dans une sublime chambre pour quatre personnes, qui dit mieux ? Une bonne adresse à retenir pour un week-end cossu entre potes.



Que faire autour de Briançon ?


- aller dormir à La-Salle-les-alpes, dans La vieille ferme 
- passer une après-midi au spa Les grands bains à Monetier-les-bains, un coup de coeur absolu - 21€
- prendre le télésiège d'été et partir en randonnée quelques heures au sommet de la montagne ici & ici





L E   C O L   D U 



Situé à seulement 30 min de route de Briançon, en plein parc national des écrins, le col du Lautaret, véritable balcon de haute montagne culmine à 2057 mètres d'altitude. Avec sa vue imprenable sur le glacier de La Mèje, le col du Lautaret offre un point de vue grandiose sur les sommets enneigés des alentours qui mettra des étoiles dans les yeux des apprentis photographes aux plus confirmés. Frontière naturelle entre deux versants, le col du Lautaret, du fait de sa richesse géologique et climatique, est aussi un site naturel privilégié d'observation botanique.

Rendu célèbre par le Tour de France, le col du Lautaret attire cyclistes et grimpeurs de tous bords, tant les chemins de randonnées sont nombreux à y prendre leur départ.



La route oscille dans les hauteurs sur quelques kilomètres, sans difficultés majeures pour se rendre au col du Lautaret. Perché sur ses hauteurs, une petite colline aménagée où l'on trouve quelques shops, deux snacks et un bar d'altitude (où il sera difficile de manger autre chose qu'un sandwich), rendez-vous des automobilistes et motards.

Plus haut, perdu au fond d'une route, au milieu des herbes hautes infestées de sauterelles, le jardin botanique du Lautaret mérite le détour. Riche d'une flore de haute montagne de toute beauté, ce site aménagé offre de nombreux points de vue fleuris assez magnifiques depuis leur joli panorama sur les glaciers. Assez bêtement, j'ai choisi de faire l'impasse sur cette visite à 7€, non pas pour son prix assez élevé, mais plutôt en raison de ma peur panique et mon refus total de promener mes jambes nues le long d'un sentier infesté de sauterelles.


Que faire autour du col du Lautaret ?


- prendre le panorama sur les glaciers en photos
- aller randonner sur les nombreux chemins qui y prennent leurs départs
- monter sur les hauteurs pour visiter les (très fleuris) jardins botaniques du Lautaret - 7€
- poursuivre la route jusqu'à l'oratoire du Chazelet
- bifurquer au col du Galibier pour un panorama encore plus exceptionnel (cf plus bas)





L E   C O L   D U 



Situé haut, bien plus haut dans le ciel, observer ses routes se perdre dans les hauteurs depuis le col du Lautaret a quelque chose de peu rassurant. On peine à croire qu'il est encore possible de monter si haut dans les montagnes, et pourtant, c'est chose envisageable avec le col du Galibier.

Le col du Galibier culmine à 2642 mètre d'altitude. Surnommé Toit du tour de France, il représente une de ses étapes les plus légendaires, et pour cause : il s'agit d'un des plus hauts col de France. Fermé la plus grande partie de l'année pour cause de route impraticable (verglacée/ enneigée, bref, dangereuse) le col du Galibier a pour particularité d'être le point de jonction entre le département des Hautes Alpes et celui la Savoie.

Qu'il est impressionnant de rouler sur ses routes. A flanc de montagne, sans marquage au sol, un maigre fil de protection de temps en temps, on sent qu'à tout moment, on peut basculer dans le décor. Le point de vue est si haut qu'il en est vertigineux. La route n'a pas grand chose à envier à un documentaire sur les chemins les plus dangereux de l'Himalaya (bon ok, j'exagère un peu). Un bon quart d'heure d'ascension, qui vous donnera envie de souvent vous arrêter prendre des photos, lorsque c'est possible. La vue en contrebas est imprenable, et les reliefs aussi impressionnants que variés. On est déjà bouche-bée, et ce sans avoir atteint le sommet.




Mais alors arrivé en haut... Le point de vue est tout bonnement exceptionnel. Il s'agit tout simplement de l'un des (si ce n'est du) plus beau panoramas alpins qu'il m'était donné de voir. J'ai senti mes sens en alerte, mon coeur battre fort au sommet du col du Galibier.

Signe du col franchi, un tout petit parking très fréquenté où de nombreux touristes viennent se garer. Et puis ce panneau dans le virage, au beau milieu de la route, devant lesquels les gens viennent se prendre en photo, faisant fi du fait de poser au beau milieu d'un virage routier. A gauche, les Hautes Alpes, à droite la Savoie, tracés comme au marqueur de long des reliefs. C'est incroyable à observer, cette vue à 360 degrés sur les montagnes. On se sent sur le toit du monde.

Le col du Galibier, c'est aussi un rendez-vous de clubs de motards. Ils sont des dizaines avec leur veste en cuir, italiens pour la plupart, à poser fièrement devant l'objectif, braillant leur langue au beau milieu du silence (d'ailleurs, une raison de l'hécatombe du covid 19 en Italie, un langage plus postillonnant que les autres ?), tandis qu'un petit groupe de motards allemands s'est paré de gillets jaunes par dessus le blouson de cuir, donnant l'impression d'encadrer le site au premier abord.

Il souffle un vent glacial, un climat de haute montagne, qui rend le gros pull obligatoire en plein mois de Juillet. Depuis le parking, on peut grimper plus haut dans les hauteurs, dix minutes de marche, pour un meilleur panorama, sur un petit sentier rocailleux très pentu.

Observer la route qui serpente en contrebas coupe le souffle. C'est somptueux, c'est vertigineux, c'est inoubliable. La légende raconte (mais je suis dubitative) qu'on peut même apercevoir le Mont Blanc les jours dégagés de grand soleil.



D A N S   L A  V A L L É E   D E 


Vallouise était un arrêt obligatoire. Pour la puissance émotionnelle qui me relie à ce nom. J'ai passé tant d'étés à Vallouise, dans mon enfance. Vallouise c'était les bons moments, les fleurs à cueillir, le cri des marmottes, le bleu voilé du torrent, les sommets enneigés des glaciers, le bon air de la montagne. J'y ai appris à reconnaitre les oiseaux, à randonner, à dessiner sur du papier vitrail, et j'ai longuement regardé, seule et en silence, totalement fascinée, la valse hypnotique des parapentes, qui atterrissaient dans le grand champ, près du camping.

J'espérais reconnaitre quelques bouts de mon enfance, morceaux de moi-même laissés là-bas, du temps où mon grand-père était encore en vie, ces moments à Vallouise ayant été globalement des moments plutôt heureux. J'ai eu quelques flashs, des bribes de souvenirs plus ou moins distincts. Je me rapellais d'un bel endroit. J'avais tort : Vallouise est un très bel endroit.



Voie royale pour atteindre le coeur du parc national des écrins, Vallouise est souvent le point de ralliement avant les grandes randonnées dans les glaciers.

Il y a d'abord le village, son style alpin, ses jardinières de fleurs et le bleu glacé du torrent qui la traverse. Quelque chose dans ses rues atteste de la richesse d'antan du village. Peut-être l'architecture travaillée de ses grandes maisons, ou la grande présence de son patrimoine religieux. Puis il y a sa Maison du parc national des écrins, lieu pédagogique de préservation de la montagne où j'ai tant passé de temps quand j'étais petite (oui, j'aimais déjà les musées, je sais...).


Un peu plus haut, à 10 min en voiture, Ailefroide et sa communauté de campeurs. La moyenne d'âge est en chute libre, ça sent la liberté. Ils ont l'air tous resplendissants de santé, le hale bronzé des randonneurs, kayak, vtt, sac à dos, piolets et mousquetons à la ceinture, bref, des campeurs à l'assaut de la montagne. J'aime assez l'ambiance qui y règne, à la cool, des sportifs avec des guitares qui dorment dans des tentes. Ce petit hameau préservé n'est habité qu'en l'été, pour sa situation très prisée de camp de base, point de départ des plus grandes randonnées du massif des écrins.

Haut lieu de l'alpinisme en France, 2ème spot après Chamonix, c'est par Ailefroide que s'ouvre la voie vers les grands glaciers, le Glacier Noir et le Glacier Blanc. Le départ s'effectue par Le pré de Madame Carle.

Merveille touristique et lieu le plus photographié des Hautes-Alpes, le pré de Madame Carle incarne le fin fond de la vallée, là où l'accès routier s'arrête et où se prennent les départs vers les grands sites d'alpinisme tel que La Barre et Le Dôme des écrins, vers les grands glaciers des Alpes.

Sur la route pour s'y rendre, (10 min en voiture depuis Ailefroide), je sens que je reconnais les lieux. Oui, ce chemin, cet horizon, je les ai vus, vus et bien revus. Je ne pourrais malheureusement pas terminer le puzzle de mes souvenirs. La voiture montre des faiblesses à la montée. C'est un euphémisme, elle refuse de gravir les 7km de pente. Nous devons renoncer au Pré de Madame Carle. Frustration.

En faisant demi tour sur cette route étroite, nous dérangeons un groupe de retraités qui ont la gentillesse de nous indiquer la nature de la panne : deux de ces trois hommes sont garagistes. Ils sont plutôt sympathiques et débonnaires. L'un m'attrape par la manche et me fait voir cette forme marron tout là-bas, un chamois ! Et tandis qu'ils s'envoient des vannes avec son amie, chacun défendant au mieux ses origines, à savoir Vallouise et Monetier-les-bains, elle a la gentillesse de m'indiquer un coin pour observer les marmottes, plus bas dans la vallée. Chouette rencontre.




A U T O U R   D E 

Montdauphin place forte, village au coeur d'un monument, a beaucoup en commun avec Briançon. Construit lui aussi sur un éperon rocheux, lui aussi bastion montagneux imaginé par Vauban, classé lui aussi au patrimoine de l'UNESCO, il abrite au sein de ses remparts la plus fine des ambiances provençales, estivale à souhait, riche et peu connue de standards touristiques.

Un des villages que j'avais le plus envie de visiter au cours de ce séjour, c'était clairement Montdauphin. Pas très renseignée et prise à la gorge à cause d'un soucis de voiture, j'ai malheureusement raté cette visite, putain.

Nous arrivons bien tard à Montdauphin, le soleil est en train de se coucher et les options ne sont pas multiples aux alentours pour manger dans un cadre agréable en ce dimanche soir. Accéder à la ville nécessite de se garer à l'extérieur des remparts et une petite marche dans le champ de ses alentours me permet de les admirer au coucher du soleil. Montdauphin ressemble beaucoup à Briançon, avec la même gouttière au milieu de la rue principale, des remparts et un fort accent de villégiature provençale qui privilégie la volupté des sens. Pour autant, quelque chose dans la plus habituelle tradition provençale, moins alpine, s'en dégage.





20h30, un dimanche soir, pas âme qui vive. Montdauphin est une ville morte. Nous croisons moins d'une dizaine de personnes. C'est beau, plein de charme, mais lugubre à la tombée de la nuit. Par hasard, après s'être fait refuser partout, nous tombons sur un petit restaurant caché dans un jardin, Le galet - chez Jackie et Fifi, qui nous accepte, parce qu'une table a annulé sa réservation. Ce sera le meilleur restaurant du séjour. Le cadre est joli, plein de charme, les plats d'une finesse à tomber, mon assiette végétarienne est copieuse, peu onéreuse et très goûtue : de la cuisine raffinée, avec des verres de vin, le rosé comme le rouge, extrêmement bons et une infusion de verveine citronnée avec des fleurs fraiches assez inoubliable.

Retourner sur le parking en pleine nuit a quelque chose de scabreux. Pas un seul lampadaire, les phares criards d'une voiture, le silence oppressant des camping cars garés sur le parking. Je ne serais pas étonnée de trouver un jour à la une des journaux un meurtre des plus sanglants ayant eu lieu à Montdauphin. La vie nocturne dans les montagnes porte en elle quelque chose de rude et d'un peu grégaire : j'imagine sans peine les villageois à l'abri derrière les volets, tremblants de peur à l'approche de la bête du Gévaudan, version 1765 ou version 2020.





C'est par hasard, en raison de l'affiche complet de tous les hôtels de Montdauphin que nous nous sommes retrouvés à dormir à Eygliers, qui n'était pas prévue au programme. Nous y perdrons beaucoup de temps, faisant la tournée des garagistes qui eux aussi sont tous complets (décidément, la saison est saturée de touristes). Il faut dire qu'Eygliers est une sorte de pivot, tout au bord de la route qui relie Embrun à Briançon, pile au carrefour qui mène aux stations de Vars, Risoul et débouche dans la vallée du Queyras. Deux petites attractions méritent cependant un détour par Eygliers.





Curiosité locale, cette formation rocheuse naturelle formée à partir d'un écoulement de l'eau se fige avec l'érosion. Fortement chargée en sulfate de chaux et autres minéraux propices à l'amoncellement, c'est avant tout sa couleur ocre qui intrigue. Placée pile sur l'antique axe Arles-Rome, cette fontaine qui se construit elle-même depuis des millénaires en était déjà une du temps des romains, qui déjà, y jetaient des pièces en offrande.

Pour moi, ce fut encore une madeleine de Proust. Mes grands-parents m'y avaient menée, enfant. Je revois encore mon grand-père m'expliquer que la fontaine change de forme tous les cent ans, à cause de l'érosion. J'avais été émerveillée par cette espèce de monstrueuse tête de lion et j'avais imaginé le nouveau visage qu'aurait la fontaine quand j'aurais 107 ans, persuadée que l'avenir me réserverait un si grand âge.

Me confronter à cette image, des années plus tard, m'aura bien fait sourire. Elle n'est pas aussi merveilleuse que dans mes souvenirs, cette fontaine. Peut-être est-elle devenue plus aménagée. Il s'agit d'une petite balade de dix minutes depuis le parking pour accéder à cette curiosité naturelle. Sur le chemin, la pierre des reliefs s'effrite, de l'ardoise qu'on peut ramasser à volonté, comme adorait le faire mon grand-père. J'en prélève un bout, en pensant à lui. J'ai maintenant très envie de retourner voir son paysage d'hiver avec ses stalactites.





C'est la dame rencontrée à Vallouise qui nous avait parlé de cet endroit absolument absent des guides et des blogs sur internet. On l'a trouvée au petit bonheur la chance, en passant devant. Et pour cause : elle se situe juste en face ou presque de l'accès à la fontaine pétrifiante.

De ce que je savais, la marmotte est un animal sauvage assez craintif dont le cri résonne souvent en haute montagne à l'approche de prédateurs. Emerveillée, je les ai souvent observées avec des jumelles, parfois approchées de près, caressées même une fois.

Pour autant, je ne me doutais pas qu'il existait un parc à marmottes en liberté dans les Alpes, et encore moins tout au bord d'une route nationale. Et pourtant ! Il s'agit donc d'un sentier -ridiculeusement - aménagé le long duquel sont nichées des marmottes apprivoisées qui n'hésitent pas à venir s'approcher des visiteurs. Fervente défenseuse de la cause animale et absolument contre tous les parcs animaliers, j'ai tout de même tenu à voir de mes yeux cette curiosité locale.

L'entrée est complètement gratuite, le chemin balisé et la balade très courte. A plus de midi, avec ce soleil haut dans le ciel, les marmottes sont au frais dans leurs terriers, et je n'en ai vu qu'une de dos, assez loin, alors que les visiteurs croisés se targuaient d'en avoir approchées de très près.

A la place, nous rencontrons le "garde forestier", Sebastien, de "A pas de fourmi 05", bénévole chargé de la protection des marmottes avec qui nous discutons du lieu. Et les nouvelles sont catastrophiques. La marmotte, menacée dans ses espaces, commence lentement à s'éteindre. Ici dans le parc règne la culture délétère de "donnons à manger aux marmottes" malgré les interdictions répétées. Nourries de bouts de pain et de carottes dans le meilleur des cas, les marmottes, mammifères herbivores, attrapent la pelade quand ce n'est pas le diabète et les bénévoles ramassent des cadavres, inquiets de constater que la population du parc diminue d'année en années.

D'ailleurs, pour la première fois, il n'y a pas de marmotton cette année, ce qui n'est pas très bon signe. Parlons maintenant de l'agriculteur limitrophe, le plus influent des alentours, qui n'hésite pas, quand les marmottes s'aventurent dans son champ, à leur défoncer le crâne à coup de pelle (si, si...). Est-il nécessaire de dire que la mairie d'Eygliers, le cul entre deux chaises, n'est pas très active pour la protection de cet animal emblématique des Hautes Alpes ?

Bref, donc, si vous passez au Rocher des marmottes, prenez le temps sur le parking en contrebas de ramasser des trèfles et des pissenlits si vous souhaitez nourrir les animaux, car les carottes et les bouts de pain les tuent ! En contrebas également, une jolie petite buvette dans un jardin où il fait bon déjeuner à l'ombre des arbres.


Que faire autour de Montdauphin ?

- promener le long des balcons de la durance
- aller visiter le village de Guillestre et son joli marché du lundi matin
- marcher jusqu'à la fontaine pétrifiante de Reotier
- aller observer les marmottes dans leur milieu naturel
- se balader le long du Guil





d a n s   l a   v a l l é e   d u   Q u e y r a s


Une partie des Hautes-Alpes que je connaissais pas, un endroit que j'avais envie de visiter depuis un moment, le Queyras. Avec ses consonances mystiques à la "é qué s'appelerio Quezac", le Queyras c'est celle vallée au fin fond des Hautes Alpes, dernier bastion français avant l'Italie. Je ne savais pas spécialement à quoi m'attendre. Je m'imaginais une contrée humide et sauvage, un paysage alpin profond, proche du tyrol. Il n'en est rien.

Les routes du Queyras diffèrent énormément des routes amples, faciles et régulières qu'on croise habituellement dans les Alpes. Ici on sent qu'on s'enfonce plus profond dans la nature, avec ses voies qui serpentent au fond des gorges, parfois à flanc de montagne. On a l'impression de percer la roche, en empruntant ses nombreux tunnels où parfois, deux voitures ne passeront clairement pas. D'ailleurs, pour pallier à l'étroitesse de ses routes, il arrive de croiser de longs feu-rouges, où le compteur des secondes s'égrènent parfois jusqu'à cinq minutes (que c'est long...) pour laisser passer les voitures qui viennent en sens inverse. Le dénivelé est souvent costaud, avec des pentes et virages parfois en tête d'épingle.

Mais le Queyras a quelque chose de majestueux, peut-être son histoire riche, la valeur accordée à son patrimoine, ou tout simplement les efforts de ses habitants pour continuer à en faire un lieu préservé. Bordé de mélèzes et de pins, traversé par le Guil, j'ai tout de même été surprise par la petite taille de cette vallée, qu'on sillonne en peu de temps finalement, le long de ses étendues sauvages à perte de vue, finalement plus méditerranéennes que du côté du massif des écrins.





Notre première étape dans le Queyras, c'était la majestueuse petite ville placée le long de sa porte d'entrée, Château-Ville-Vieille. Beaucoup de confusion d'ailleurs, point de vue terminologie avec cette ville. Château Queyras, Château Ville-Vieille, Fort Queyras, Ville-Vieille, désignent quasiment la même chose. Coupé en deux parties, Château Ville-Vieille et quelques mètres plus loin, Ville-Vieille, on retiendra du lieu évidemment Fort Queyras, son point d'attraction principal.

Fort Queyras, c'est donc ce château perché sur un éperon rocheux qui domine la vallée depuis les hauteurs de sa superbe. Difficile de ne pas être impressionné par ce bijou architectural en pleine nature, avec ses airs de contes de fée vieille Europe.

Personnellement, je trépigne. Enfin un château à visiter dans les Hautes-Alpes !
On ne sait pas exactement de quand date la construction de Fort Queyras. Les premières mentions dans les écrits datent du 13ème siècle, et tandis qu'il fut bâti pour résister aux assauts des Savoyards et des Provençaux, il est rattaché tour à tour au Dauphiné, puis aux Escartons, un découpage du territoire partagé avec l'Italie. Plus tard, Vauban vient ajouter sa science à ses constructions.
L'ensemble donne quelque chose d'hétéroclite, tour à tour marqué par des ajouts architecturaux de nombreuses époques.

La visite n'est pas fabuleuse en soi. Le fort est bien plus beau à l'extérieur qu'à l'intérieur. Les appartements ne sont pas meublés, de grandes cours désertes et de grands murs vides ne sont pas des plus immersifs pour se projeter vers une autre époque. Pour autant, il émane quelque chose de ce lieu, rendu vivant par des panneaux explicatifs pour enfant, particulièrement bien faits. Sous-bassements, pont-levis, donjons et meurtrières défilent sous les yeux des visiteurs si peu nombreux, dans un court périmètre, pour une courte durée. Compter une petite heure de visite, en se prélassant dans les hauteurs sur les chaises au soleil face à l'immensité de la montagne.








J'ai eu l'impression d'approcher un autre temps, lors de ce moment entre ces murs, tant c'est aussi la riche histoire de Fort Queyras qui impressionne. L'autre curiosité à ne pas manquer dans les alentours, c'était l'armoire aux 8 serrures, un bel exemple d'équité démocratique. Dans cette armoire étaient conservées les archives de la région, dont chaque clé était détenue par les huit dirigeants des huit communautés du Queyras. L'armoire aux huit serrures se situe au premier étage de la Maison communale à Ville-vieille.

Prendre une photo réussie du fort n'est pas chose facile, sa beauté multiple n'étant pas simple à synthétiser sur une seule image. J'ai trouvé que les deux meilleurs points de vue photos se situaient sur les hauteurs de Château Vieille-Ville, où l'on accède par un petit chemin sur la gauche avant le feu rouge. La vue depuis Vieille-Ville n'est pas en reste également, surtout prise depuis les berges du Guil. De mon côté, je me dis que j'ai très envie de revenir voir Fort Queyras en hiver, pour le plaisir de le contempler sous la neige.





Ici, ce qui aura rendu notre visite de Fort Queyras assez inoubliable, ce sera la gentillesse de Guy "du Château", l'adorable monsieur de l'accueil qui en réponse à mes questions sur le dénivelé des pentes du Queyras a saisi son téléphone et nous a recommandé auprès d'un autre monsieur, "sans montre et avec des mains d'or."

Régis Pellisier est chaudronnier d'art. Son atelier, sur les hauteurs de Fort Queyras ruisselle de créativité et l'homme est d'un enthousiasme à toute épreuve. Sa gentillesse nous aura durablement marqués, d'autant plus qu'il aura résolu notre problème de voiture en deux temps trois mouvements, nous permettant de poursuivre notre périple dans le Queyras. Pour ma part, j'aurais beaucoup aimé cette rencontre. Merci Guy, merci Régis.





La dernière étape de ce road trip dans les Alpes, c'était l'atypique Saint-Véran, ce petit village si haut perché dans la montagne qu'il porte le titre de plus haut village d'Europe en plus d'être décoré du label "les plus beaux village de France". J'ai été plutôt saisie par la singularité du lieu, me suis délectée d'un bon repas avec vue panoramique sur les montagnes, le cri des marmottes résonnant dans la vallée.

La route monte dru pour aller jusqu'à Saint-Véran, sans les réparations de Monsieur Régis, on aurait clairement du renoncer à cette visite. Depuis Fort Queyras, une vingtaine de minutes seulement. Nous y arrivons pile pour la golden hour, et que la route est belle sur les hauteurs. En chemin, le petit village de Molines, qui m'a fait tant penser aux petites habitations du Col du Noyer, perché dans la montagne face au soleil, avec rien, absolument rien autour. Pour sûr, je viendrai y dormir un jour, à Molines.

Saint Véran culmine à 2042 mètres d'altitude, perché sur une montagne au fond d'une vallée, seul repère humain au milieu de l'immensité. On s'est demandé tout de suite, mais qu'est-ce qui a pu poussé les gens à venir bâtir un village dans de si difficiles conditions d'accès à une époque où l'homme ne pouvait compter que sur la seule force des ses bras et ses jambes ? Il semblerait que ce soit un gisement de cuivre qui soit responsable de cette expansion vers le haut. A noter un haut niveau d'ensoleillement dans ce village également, ce qui lui vaut même de compter en ses murs un observatoire dédié au soleil, la maison du soleil.

En levant les yeux vers la crête de cette montagne, j'ai vu le fil électrique du télésiège se perdre dans le bleu du ciel. En été, il ne marche pas. En hiver, ce soit être exceptionnel, de skier là-haut, avec cette incroyable vue sur les montagnes en contrebas.





Le village se divise en plusieurs parties. Il s'agirait presque d'une petite ville, avec ses hôtels, sa poste, son office du tourisme, ses petits restaurants et ses petites boutiques artisanales. A l'arrivée, on peut se garer sur son extrémité droite comme sur son extrémité gauche, l'espace étant réparti plus en largeur qu'en épaisseur, tandis qu'il s'étale sur trois niveaux de hauteur.

Le village de Saint Véran a quelque chose d'authentique, de préservé, bien plus qu'ailleurs. On sent que les habitants tiennent à leurs traditions et à leur histoire séculaire. La plupart de ses maisons sont bâties dans cette architecture alpine inédite, avec des troncs de bois empilés et croisés aux angles, comme on n'en rencontre nulle part ailleurs dans les Hautes Alpes, ce qui confère à ce village un charme fou. Parce que de nombreuses photos "des aieux" en noir et blancs sont placardées dans la ville, on a aucun mal à s'imaginer la rude vie des paysans de l'époque, au milieu de ces rues qui semblent ne pas avoir bougé d'un iota depuis les années 20.

Ce qui étonne à Saint Véran, c'est aussi l'omniprésence de la figure du coq, qu'on retrouve jusqu'à perchée sur certaines grandes croix, ce qui se comprend lorsqu'on sait que Saint-Véran se proclame "village où les coqs picorent les étoiles". Mais la grande légende de Saint-Véran, c'est sa coulobre, son espèce de dragon qui jadis, hantait le village de la Fontaine du Vaucluse, avant d'être chassé par l'évêque Saint-Véran. La coulobre s'envole donc vers les Alpes où elle s'enfuit pour mourir et chute précisément à... Saint Véran. On la retrouve sculptée sur les colonnes attenantes à l'entrée de l'église.





Que faire à Saint Véran ?

- déambuler dans ses petites rues, savourer l'impression de vertige et la beauté de ses architectures
- partir à la chasse aux cadrans solaires renaissance disséminés dans toute le village
- contempler la jolie église de la ville et ses coulobres sculptées sous le porche
- s'étonner des croix de mission, croix ornées d'objets qu'on croise ça et là
- visiter le tout petit musée du Soum, la plus vieille maison du village, dédiée à la vie paysanne d'autrefois
- visiter la vieille maison traditionnelle, un habitat gardé tel quel commenté par un ancien habitant
- en apprendre plus sur les astres à la maison du soleil
- partir en randonnée sur les nombreux chemins au départ de Saint Véran
- partir en randonnée vers ses deux lacs dans les hauteurs, le lac de la Blanche et le lac de Clausis 





Deux pépites pour manger à Saint Véran :

- le restaurant La gratinée de l'hôtel Les chalets du Vuillard, où l'on sert une cuisine fine des montagnes (sous entendu, riche en fromage et gras au point de  me  donner mal au coeur, mais néanmoins très bonne). La vue donne sur les montagnes, le cadre est plutôt joli. J'ai plutôt bien aimé mon gratin de ravioles aux morilles après avoir pris soin d'enlever les 3cm de couche de gruyère qui le coiffait.

- le restaurant panoramique La marmotte ! Le cadre était extrêmement agréable avec sa sublime vue dégagée sur les montagnes. Il s'agit je crois du cadre le plus inoubliable de tous les restaurants qu'il m'ait été donné d'essayer dans les Hautes-Alpes. La cuisine est légèrement moins qualitative que la première, mais ne faites pas l'impasse sur le sirop de châtaignes, juste excellentissime.

Dernière petite remarque, le soleil tape vraiment fort, à Saint Véran plus qu'ailleurs en montagne, ne pas lésiner sur l'écran total histoire d'éviter le bronzage "raton laveur".




Que faire autour de Saint-Véran ? 

- visiter Fort Queyras, évidemment
- s'arrêter sur la route à la maison de l'artisanat de Ville-Vielle
- se balader sur le plateau de Molines au coucher du soleil
- aller voir le musée du costume d'Abriès
- monter jusqu'au village d'Arvieux






e n   c o n c l u s i o n

En partant pour la énième fois en week-end dans les Hautes-Alpes, je m'attendais pas à être émerveillée par cet environnement que j'ai l'habitude de fréquenter depuis mon enfance. Tout est pourtant différent de l'autre côté des écrins. J'ai (re)découvert une contrée riche et variée en paysages et plus surprenant, en patrimoine. Vue incroyable sur l'éternelle beauté des glaciers, villages de charme et d'histoire, trésors de la nature en tous genre... Il y en a finalement pour tous les gouts dans les Hautes-Alpes.

A 3h de route de Marseille, la région offre ses multiples facettes au voyageur. L'air pur, le froid des montagnes (salvateur lorsqu'il fait 35° partout ailleurs), la diversité de sa faune et de sa flore, les multiples activités à vivre dans chaque vallée... Tout autant de raisons de venir se délasser et découvrir un autre art de vivre au pied des montagnes.

Au final, je dirais qu'un long week-end dans les Alpes peut finalement revêtir plusieurs visages et convenir à toutes sortes de vacanciers, des plus sportifs aux plus historico-arty d'entre nous. Fait surprenant, on peut aussi profiter de ses attraits avec une algodystrophie de la cheville, ce qui est tout de même une prouesse dans ce pays rocailleux où il fait bon respirer le grand air.


N O T E   P O U R   M O I - M Ê M E 
à faire la prochaine fois de ce côté-là des Hautes-Alpes :


- monter jusqu'en haut de Briançon
- visiter plus longuement Embrun
- visiter Montdauphin de jour
- aller voir l'oratoire du Chazelet
- monter jusqu'au pré de Madame Carle
- balader le long des balcons de la durance
- essayer d'apercevoir les marmottes au rocher des marmottes
- visiter le village de Guillestre (et son marché du lundi)
- marcher sur le plateau de Molines au coucher du soleil
- randonnée de Saint Véran jusqu'au lac de la blanche
- se prévoir une journée dans les bains de Monetier-les-bains
- descendre jusqu'à Barcelonette
- découvrir pourquoi ma grand-mère adore tant Jausier
- m'offrir une nuit dans le château de Picomtal
- visiter les mines d'argent de L'argentière-la-bessée










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