[ Netflix ] Les désastreuses aventures des orphelins Baudelaire: cynique, drôle, intelligent et mystérieux

21 mars 2019




Les désastreuses aventures des orphelins Baudelaire, c'était une série de livres phrases de mon adolescence sur lesquels je ne me suis jamais penchée, trop occupée à aduler d'autres oeuvres de fiction. On me les avait pourtant conseillés maintes fois, et j'avais sincèrement envie de m'y mettre.  Mais ça ne s'est jamais fait, et je suis complètement passée à côté de ce phénomène littéraire. Tout comme je suis passée à côté de l'adaptation cinématographique du livre, avec Jim Carrey, qui me tenait bien pourtant, mais non, toujours pas eu le temps.

Et puis Netflix a fini par s'emparer du sujet et retranscrire Les désastreuses aventures des orphelins Baudelaire en série. Là aussi, j'ai mis du temps à m'y pencher, trop occupée à aduler Stranger Things. Et lorsqu'enfin je m'y suis mise, je suis arrivée bien tard dans la boucle. Le succès déjà installé, la critique très enthousiaste, la saison 2 déjà sortie, etc...

Et autant dire qu'après visionnage, je regrette de ne pas avoir laissé leur chance aux orphelins Baudelaire et au géniallissime Count Olaf plus tôt.









La bande annonce {ici}

Le pitch : Violet, Klaus & Sunny Baudelaire, trois enfants aux yeux brillants d'intelligence, connaissent leur premier désastre : la mort de leur parents dans un incendie de la maison familiale, par un jour de grisailles où ils passaient l'après-midi à la plage. Alléché par l'odeur de l'immense fortune bloquée reposant sur le compte des trois enfants, le Comte Olaf, comédien aussi charismatique que désargenté décide d'oeuvrer pour devenir leur tuteur, espérant par là mettre la main sur leur héritage. 

De péripéties en péripéties, les Baudelaire sont trimbalés de tuteurs en tuteurs, toujours coursés par le Comte Olaf et tandis qu'un épais brouillard ne cesse d'entourer le mystère de leurs origines, les aventures des trois enfants s'enlisent dans une malchance et une série d'événements tous plus calamiteux les uns que les autres.








On reconait souvent une bonne série à son générique. Et dès les premières notes celui des désastreuses aventures des orphelins Baudelaire, tout y est. La musique entrainante, la beauté du concept visuel et les lancinantes paroles qui nous préviennent tout de suite : "Look away", ne regardez pas cette série, elle va vous déprimer car tout se finit mal dans l'histoire des orphelins Baudelaire.

J'ai tout d'abord beaucoup aimé le ton de la série, qui a l'intelligence d'osciller entre un propos pour adulte plein d'humour comme d'intelligence et un choix de forme estampillé jeunesse, avec ses jeunes héros et leurs aventures rocambolesques. On peut dire que Netflix surfe clairement sur la vague de sa cible principale : les jeunes adultes.

A cheval entre plusieurs influences, Les désastreuses aventures des orphelins Baudelaire reprennent le principe récurent des dessin animés de notre enfance, avec des héros plus intelligents que les adultes qui ont toujours une longueur d'avance sur eux. A ceci près que l'ennemi ce coup-ci est loin d'être un imbécile et qu'à chaque fois toutes les parties se jouent très serrées. Toujours dans cette veine redondance de gags, grotesqueries qui ne duperaient personne mais sont acceptées par le spectateur, la série innove et prend même parfois des airs de polar.


L'originalité dans de ces épisodes, c'est aussi leur forme. Très fidèle à ses romans, la série est introduite et menée par son narrateur, Lemony Snicket, qui peut surgir à n'importe quel moment pour amener un contre exemple, effectuer un flashback, décrire une émotion ou même expliquer un mot.

Au travers de l'histoire des Baudelaire, l'auteur s'applique aussi à une belle critique de la société (je dirais même de la société américaine) insensible ou passive aux malheurs des enfants. Ses personnages, souvent sans scrupules, n'hésitent pas à trouver normal de vouloir condamner des enfants par le bûcher, ainsi que des tas d'autres situations amorales.

Comme souvent, le charme opère notamment grace à sa V.O, condition sine qua non pour apprécier la série. Nous on a complètement été charmés par les "Theree you are, Baudelaires !" et "Count Olaf" et la fameuse tirade "He's Count Olaf is disguise !".








Décors soignés, costumes à tomber et esthétique travaillée 

Ce qui saute clairement aux yeux de prime à bord, c'est la richesse visuelle des images de cette série. L'esthétique tantôt noire et tantôt très colorée, à la Burton, semble aussi s'emparer des codes des films de Wes Anderson, et ce, pour mon plus grand bonheur. Décors, costumes, mobiliers, tout est magnifique d'un bout à l'autre de chaque minute de cette série. Mention spéciale pour les déguisements du Comte Olaf et de ses sbires, toujours très pointilleux, et pour l'élégance sans âge des différentes tenues des Baudelaires.

J'ai beaucoup aimé le choix de l'équipe de transposer l'intrigue de sa série dans un univers sans âge et sans lieu. Impossible de savoir où et quand se situe l'histoire, comme c'est aussi le cas dans le roman.
On serait tentés de parler des années 50 aux Etats Unis, mais il y a tellement d'Angleterre et d'influence victorienne dans le paysage et les costumes, d'aspect archéologie coloniale et vieux bâtiments médicaux des années 20... J'ai tout particulièrement aimé cet aspect, perdu entre les influences, où nous est contée une étrange histoire au sein d'un lieu et d'un temps qui n'existent pas.


Humour et suspends dramatique : une mise en scène efficace

Un des meilleurs atouts de cette série c'est aussi son humour. Irrésistible, caustique, et même cynique, le but est toujours atteint et je me souviens avoir littéralement éclaté de rire de nombreuses fois.

Gags efficaces, situations rocambolesques, façons de s'exprimer hilarante, comiques de situations irrésistibles, effets scénaristiques efficaces, les show runners trouvent toujours une solution pour nous faire travailler les zygomatiques.

J'ai trouvé leur mise en scène assez inspirée de la pâte Wes Anderson et pas mal de ressemblances avec The grand Budapest hôtel, par exemple, tant au niveau des cadrages que de l'esthétique générale et de la façon de se faire succéder les événements.

Le fait de rire ne nous empêche pas de pousser des Haaaaaan lorsque certains petits éléments bien distillés tout au long du récit font rebondir l'intrigue et participent à l'effet d'un suspens dramatique plutôt très bien amené.

Des personnages excentriques et hauts en couleur, portés par un casting exceptionnel

Mais l'atout numéro 1, celui qui nous a clairement fait languir la suite des épisodes, c'est évidemment les incroyables personnages de cette série.

Les trois enfants Baudelaire sont un délice. Ils sont beaux, charmants, candides, ont les yeux qui pétillent, sont aussi débrouillards qu'intelligents. J'ai beaucoup aimé les aptitudes que leur valent la construction de leur personnalités. Violet l'inventrice, Klaus le savant et Sunny le bébé aux dents acérées. En ça les trois acteurs sont parfaits. Le joli minois de Malina Wessman accroche très bien avec les mines réfléchies de Louis Hynes, quant aux deux ans et demi de Presley Smith, la gamine est tout bonnement exceptionnelle de charisme, surtout dans la saison 2.

Dans les personnages récurrents, la troupe de méchants est aussi follement bien choisie, avec leurs sourires débiles et leurs sourcils crochus. Mention spéciale pour les deux jumelles à la trogne effroyablement flippante. Idem chez les agents, très bons acteurs qui apportent un petit plus non négligeable ( Jacqueline <3 ), avec leur vivacité, leur détermination et leur façon de surgir à n'importe quel moment.

Parmi les personnages ponctuels, il émane également de tous quelque chose de fort, de particulier et de toujours très bien joué ( Montgomery Montgomery <3 ) , tandis que les parents aperçus deux minutes ont l'air d'être juste les meilleurs parents du monde.

J'ai beaucoup aimé les Beauxdraps, semblables aux Baudelaire dans un tout autre genre, avec la même candeur, les mêmes traits fins et le même regard intelligent.

Esmé Gigi Genievre d'Eschemizerre me régale à chaque minute à l'écran et j'ai trouvé l'actrice Lucy Punch juste très très impressionnante et follement à l'aise dans son rôle complètement déjanté.

Mais le meilleur, l'incomparable reste l'extraordinaire Patrick Neil Harris déclassant tous les Jim Carrey du monde dans le rôle inégalable du Comte Olaf. Sa prestation multiple nous a complètement envoutée, pleine de charisme, de théâtralité, de ressources avec tous ces déguisement tous plus réussis les uns que les autres, sans parler de son humour et de son talent. D'ailleurs à ce stade là, doit-on encore appeler ça du talent ? S'il existait un mot plus fort pour désigner le talent, il s'appliquerait d'office à cet acteur complètement rayonnant derrière son mono-sourcil et sa calvitie, juste parfait dans les baskets de l'exceptionnel Comte Olaf, qui a lui seul a complètement transcendé les bouquins.





Le plus surprenant dans cette série c'est son incroyable fidélité aux livres. Le style, très propre à l'auteur, est très intelligemment repris pour faire ressentir les mêmes choses au spectateur qu'au lecteur.

Les épisodes de la série sont pensés en diptyques, chaque diptyque correspondant à l'histoire totale d'un roman. Avec beaucoup d'agilité, les créateurs arrivent à transcrire visuellement tout ce qui semblait impossible à porter à l'écran, petites phrases et petits éléments subtils cachés au détour d'un paragraphe de prime abord sans grande importance.

Evidemment, le ton des romans était plus enfantin, destiné à un jeune public. Les méchants sont des grands méchants qui ne veulent juste qu'être méchants et là où le Comte Olaf n'est qu'un affreux méchant à tendance redondante il est un personnage charismatique et irrésistible dans la série, bien que dépourvu de tout sens moral.


J'ai beaucoup aimé l'appropriation de l'oeuvre par les createurs de la série.
J'ai trouvé d'ailleurs qu'ils ont très largement réussi à booster les livres. Là où il m'arrivait parfois de m'ennuyer dans les pages, j'avais remarqué qu'a ce même moment la série avait choisi un parti pris différent, beaucoup plus dynamique.

Certains personnages de la série n'apparaissent pas dans les livres, en tous cas pas sous cette forme et pas au niveau où j'en suis de ma lecture. Je pense à Jaqueline la secrétaire de Mr Poe, à Larry le serveur et à la drôle de bibliothécaire de Prufrock, tous trois agents secrets déguisés et à la femme journaliste de Mr Poe, une immatérielle plaie du roman transformée en personnage.


L'ajout des sbires du Comte Olaf en tant qu'équipe et en permanence à ses côtés rajoute un côté d'autant plus savoureux qu'irrésistiblement drôle, qui n'apparait pas vraiment dans les romans.

La série parvient à nous rajouter une intrigue sous jacente assez bien menée. Les galères des parents de leur côté pour retrouver leurs enfants, quel incroyable retournement de situation à ce niveau là d'ailleurs, chapeau bas. Et les encore plus grosses galères des membres du V.F.D. pour essayer de secourir les Baudelaires sans toutefois en avoir l'air. Cet aspect donnant du souffle et du rebondissement à la série, a également pour effet d'accentuer efficacement son mystère.

Bref, les choix des créateurs de la série étaient sans arrêt les meilleurs et vous l'aurez compris, de mon côté j'ai très largement préféré la série Netflix que les livres originaux sur lesquels je me suis ruée une fois la série terminée et que j'ai avalés en quelques semaines.






On ne nous mentait pas lorsqu'on nous disait que l'histoire des orphelins Baudelaire n'irait pas en s'arrangeant. Au fur et à mesure des épisodes, tout semble aller de pire en pire. Malchance, coups du sort, le ciel (et le Comte Olaf) s'acharnent sur les personnages et leur tissent ce funeste destin le long d'une montée en épingle originale.






L A   S A I S O N  1 
intéressante bien qu'un peu indigeste


Bien que bourrée de qualités, bien que plaisante et intéressante, on avait trouvé la saison 1 plutôt longue. On voulait savoir la suite, certes. On avait accroché, on s'était attachés aux personnages, on riait des gags, mais il faut le dire : on les sentait bien passer, les épisodes.

Ça avait beau être brillant, drôle et intelligent, ça croulait tout de même sous la lourdeur du sur-chargement. Répétitif, un assez mauvais recours aux effets spéciaux (notamment avec les scènes centrées sur Sunny), avec des phrases elaborées pour ne mener nullepart... il fallait faire preuve de volonté pour continuer.

On sentait quand même cet effet "allez, respire un bon coup et go, concentration" avant de lancer l'épisode. Et même si on en était contents à la fin, il y avait toujours ce manque d'envie de s'y mettre, un peu comme quand tu étais petit et qu'aller à la danse / au foot / à la poterie était une torture pour toi mais que tu en ressortais aussi ravi que tu y étais allé à reculons.




L A  S A I S O N  2 
palpitante et bien plus fluide


Clairement plus attrayante, le mystère se tisse de plus en plus épais autour des orphelins Baudelaire. La seconde intrigue déjà lancée dans la saison 1 se densifie et donne cours à de nouvelles questions qui nous ont bien tenu en haleine. Que signifie V.F.D ? Qui est vraiment le narrateur Lemony Snicket ? Pourquoi tant d'effervescence autour d'un simple sucrier ?

Tout glissait mieux, tout nous a paru plus à l'aise dans la saison 2. Le Count Olaf, de plus en plus génialissme et charismatique, nous a emporté très loin dans les sphères célestes et tandis que les galères deviennent de plus en plus galères, de l'audace nait de toutes part et la série, qui casse les schémas répétitifs des épisodes précédents, nous a fait engloutir les épisodes en attendant toute la journée pour pouvoir voir la suite, les "Look awaaaay" du générique en tête toute la semaine.

Toutes les tensions montent, et le WTF devient de plus en plus poussé pour toujours autant de fous rires. Pour ma part j'ai beaucoup aimé l'introduction des nouveaux personnages.
Les deux triplés (si, si...) Beauxdraps, le courageux Jacques Snicket, la bibliothécaire aventurière Olivia Caliban et surtout la charismatique Esmé Gigi Geniveve d'Eschemizerre Squalor désormais en cavale avec le Count Olaf pour mon plus grand plaisir.





L A  S A I S O N  3 
montée en épingle et dénouement



On avait laissés les orphelins Baudelaire en fâcheuse posture. Pire, séparés pour la première fois, on avait craint le pire. Heureusement, leur intelligence les tire assez rapidement de ce mauvais pas et sous les derniers rires des sbires qui très rapidement quittent le comte Olaf (!!!), se réunissent et font route vers le dernier lieu sûr où ils espèrent trouver la fin de leurs malheurs. Et pour cause : c'est l'heure des réponses pour Violet, Klaus et Sunny. 

Cette saison, les orphelins Baudelaire sortent de leur statu de victime et saisissent à bras le corps leurs problèmes. Lassés de voir leur confiance déçus, ils choisissent de s'aider eux-même et de cesser d'attendre l'arrivée d'un sauveur. 

De nouveaux personnages apparaissent, qui ne seront pas inoubliables. Nous on a surtout salué le retour de l'insupportable et horripilante Carmelita Spats. Esmé toujours aussi tordante, on développe aussi une nouvelle sympathie pour Hooky, le sbire aux mains de crochet. On a remarqué que Sunny rayonne de plus en plus, ce qui donne envie de suivre l'actrice pour voir ce qu'elle donnera à l'âge adulte !

Je ne sais pas ce qu'il fallait attendre du dénouement des Désastreuses aventures des orphelins Baudelaire. On nous martèle depuis le premier épisode qu'elle finira mal et qu'elle est aussi désastreuse que toutes les autres épreuves qu'ont vécu les Baudelaire. Personnellement, j'ai été extrêmement déçue par cette fin, qui a mon sens retombe comme un soufflet. Tous les éléments par lesquels on nous tease habilement depuis de nombreux épisodes (le fucking sugarbowl ? la vraie histoire de VFD ? et les Beauxdraps ?) tombent à plat. Quant à la conclusion générale, très ouverte, elle ne ferme pas la porte à une potentielle suite. Mais j'ai ce gout dans la bouche de profonde insuffisance. Comme si je n'avais pas fait le tour de l'histoire et qu'il m'était donc impossible d'en clore les aventures.







Les désastreuses aventures des orphelins Baudelaire m'ont très agréablement surprise. Consciente qu'il y a bien souvent de bonnes raisons au succès des phénomènes littéraires, je ne m'attendais absolument pas à tomber dans le registre de l'humour avec cette série.

Concrètement, les personnages sont parfaits, l'histoire est étonnante, la pointe de noirceur et de cynisme donne du caractère au scénario. Si j'avais trouvé la saison 1 plutôt râpeuse, je me suis délectée de la fluidité de la saison 2 qui m'a tout bonnement régalée.

Rare et originale, pleine de talent, visuellement très riche et à l'esthétique très soignée, la série cumule une mise en scène intelligente, des choix d'adaptation remarquables, ainsi que des acteurs extrêmement talentueux. Et très sincèrement, ça faisait longtemps que je n'avais pas autant ri.

Bref, une très bonne série très distrayante pour qui comme moi privilégie la qualité dans les shows télévisés, au format "peu d'épisodes mais attention : des *$€%m! d'épisodes".

Pour ma part j'ai malheureusement été déçue de cette conclusion, malgré le fait que j'attendais impatiemment le démêlé final des aventures des orphelins Baudelaire. Je me suis également penchée sur les livres, mais ayant trouvé bien plus de plaisir en visionnant la série Netflix, je me suis davantage appuyée sur le déroulé télévisuel pour clore les aventures des orphelins Baudelaire et n'ai pas pris le temps de lire les trois derniers tomes.

Toujours est-il que la fin de cette succulente petite série nous a rendu bien tristes. On serait bien restés plus longtemps en compagnie des orphelins Baudelaire et de l'inoubliable Count Olaf. Je me dis aussi que pour nous mettre d'accord, nous qui avons des goûts très, très, très différents, il faut vraiment du lourd. Et pour cette raison, je recommande à absolument tous les public de regarder cette série qui a diaboliquement su nous séduire.


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