The Young Lady, inquiétant conte victorien

21 mai 2018






On était tombées sur la bande annonce et les critiques élogieuses de The Young Lady, et on s'était dit qu'il avait tous les ingrédients pour nous plaire à toutes les deux. Une Angleterre victorienne ou presque, le roman d'une femme, une jeune femme, en proie aux difficultés de la condition de son époque, prise dans les tourments suite à sa volonté de révolte. On s'était dit que ça nous plairait, le sujet nous étant cher à toutes les deux. On pensait assister aux belles images d'un conte sur les riches heures de l'émancipation féminine. On s'était trompées. The young lady nous a embarquées sur un tout autre sujet.

Le pitch : Katherine, qui vient de se marier avec un homme fortuné du double de son âge se retrouve maitresse d'une jolie demeure au fin fond de la campagne anglaise. Comme le veulent les us et coutumes de l'époque victorienne, son rôle d'épouse la force à se plier aux directives de son mari et de son beau- père, deux hommes sinistres et autoritaires. Le départ des deux hommes pour affaires finissent un beau jour par lui laisser le champ libre. Aussi, Katherine en profitera pour se ré-approprier le pouvoir de sa propre personne, allant même jusqu'à convoler aux bras d'un jeune palefrenier de la maison. Alors, désireuse de se débarasser du poids de sa mauvaise fortune, la jeune fille mettra en oeuvre les moyens les plus drastiques pour arriver à ses fins. 


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Produit par la BBC (grand gage de qualité), adapté du roman russe Lady Macbeth du ­district de Mtsensk, le réalisateur transpose l'intrigue de l'histoire initiale dans l'Angleterre du 19ème, pour un effet très "rencontre entre Albert Hitchcock, Madame Bovary et Les hauts de hurlevent."

Il nous aurait suffit de prêter plus attention au titre original pour comprendre où l'on mettait le pied avec ce film : Lady Macbeth.

Curieusement, si l'on a écarquillé les yeux de surprise et d'horreur, ce film nous a emportées loin de nos attentes, sur un terrain plus noir que prévu qui nous a tout particulièrement plu.
On frôle ici le thriller cérébral, où chaque coup avancé sur l'échiquier qui nous paraissait spontané finit par devenir une stratégie de jeu lourdement pesée et décidée.

J'avais peur de tomber dans la violence physique avec ce film. Les scènes de rapports de force, domination / soumission, présageaient de s'accompagner de plans de châtiments corporels, ce que j'avoue ne pas supporter au cinema comme ailleurs. Mais non, pas de mauvaises surprises du genre.

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L'esthétique du film est très belle, enrichie par des cadrages et autres effets très réussis : la mise en scène nous a complètement emportées.

C'était très théâtral. Rien d'étonnant à cela, le réalisateur, William Oldroyd, s'étant illustré jusqu'ici dans la mise en scène de pièces de théâtre.
Pas de musique. Juste un silence oppressant pour entourer les heures d'ennuis de Katherine.
Une succession de plan bien cadrés se relaie à l'écran. On a plus l'impression de se trouver dans un décor de théâtre que dans un décor de film.

J'ai aimé la beauté sombre et austère des images. Les robes,  les meubles, les paysages, le traité de la lumière.

Tout était sinistre dans ce bout d'Angleterre abimé par les nuages.
La maison ferait froid dans le dos à n'importe qui, avec sa rigueur aussi stricte que morne.
Le mari et son père sont deux hommes aussi terrifiants que bourrus.
La femme de chambre, Anna, ajoute une touche sombre avec ses manières de rustaudes, qui frotte sa maitresse jusqu'au sang et lui arrache la moitié des cheveux en les lui brossant.
Et même Sebastian, le palefrenier à l'attitude trouble menaçait de se transformer en dangereux personnage.

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Katherine, l'héroïne, est fascinante dans sa complexité. Ses actes font naitre chez le spectateur des sentiments ambigus. On la comprend autant qu'on la méprise, on l'accompagne dans sa cruauté pourtant candide, embrayant le pas de sa détermination et le sourire de ses petites victoires.
Au final, ne faut-il pas toujours se méfier du revers de la médaille des gens maltraités ?

L'actrice nous a véritablement fascinées. Florence Pugh, du haut de ses 21 ans, livre une prestation inquiétante et venimeuse, portant à elle seule toute l'intrigue du film sur les épaules. Ses expressions tour à tour naïves, cruelles, nous ont aimantées du début à la fin.

L'intrigue, rondement bien menée, est telle que le réalisateur contourne l'inévitable pour nous porter toujours plus loin dans la froideur de son personnage.

C'était glaçant, et pourtant brûlant, intense et surprenant. Nous, on a adoré.


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2 commentaires

  1. Coucou ! Je suis ravie de découvrir ton blog avec un tel article. Je n'avais pas du tout entendu parler de ce film jusque-là, et maintenant, j'ai vraiment hâte de le voir. Alors merci beaucoup pour cette découverte :)

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  2. Très contente également de découvrir ton blog, j'ai noté la trilogie de sophie Chauveau et maintenant ce film !
    On va se revoir ;-)

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