Hokusai, Hiroshige, Utamaro, les grands maitres du Japon à l'Hôtel de Caumont, centre d'art

30 janv. 2020






La bonne nouvelle de cette fin d'année c'était l'arrivée d'une exposition japonisante à l'Hôtel de Caumont, centre d'art. Les expo de Caumont, signées culture espaces, c'est toujours un grand moment dans l'agenda culturel de la région. On y va pour la qualité des expositions, mais aussi pour profiter du cadre enchanteur de ce magnifique hôtel particulier récemment rénové, au coeur d'Aix-en-Provence. De mon côté je raffole de ces moments, souvent un après-mdi entier suspendu dans un écrin de raffinement un peu hors du temps.


Après Turner et la couleur, - Botero, dialogue avec Picasso - Sisley, l'impressionniste et La collection Thannhauser, Caumont sort donc de la peinture occidentale et s'intéresse à son alter ego asiatique : l'estampe japonaise. Ô, joie. Il y a quelque chose de follement poétique dans les estampes japonaises à mes yeux, une finesse et une élégance qu'on ne retrouve pas spécialement dans la peinture chinoise il me semble.

L'exposition s'appuie donc sur les prêts de la collection Georges Leskowicz, collectionneur franco-polonais, qui prête pour la première fois en France plus de 150 estampes. Il s'agit d'ailleurs d'une des collections d'estampes les plus importantes au monde. On y trouve entre autres la célébrissime L’Envers de la grande vague de Kanagawa d’Hokusai.

Difficile de parler d'originaux avec les estampes. Car tel est le principe : l'estampe est un tirage obtenu par une procédure complexe d'encrage sur du papier depuis plusieurs plaques de bois gravé. Les estampes étaient pensées pour des grands tirages. Il n'est pas étonnant de savoir qu'elles ont pu nous parvenir dès le 19ème siècle, les peintres impressionnistes, Van Gogh en tête, les collectionnaient déjà, y puisant leur inspiration pour leur révolution de l'image.

Hokusai, Hiroshige et Utamaro, les plus fameux artistes sont mis à l'honneur. Mais on croise également le chemin d'autres artistes de l'estampes, aux oeuvres souvent moins maitrisées mais tout de même remarquables.

L'exposition donne à voir également de nombreux surimono, rares et précieuses estampes de grand maîtres en tirages limités, destinés à un cercle restreint de gens fortunés, souvent accompagnées de calligraphies. Elles représentent à elles seules tout le panel du raffinement japonais de l'époque.

D'ailleurs, j'ai trouvé que l'exposition se rapproche beaucoup d'une promenade. Une promenade assez leste dans le monde de l'ukiyo-e, "l"image du monde flottant". Il règne quelque chose profondément poétique dans cet enchainement de paysages zen qui évoque tout du paisible et qui, clairement, fait voyager... Ces estampes, reflets des plaisirs à la mode de l'ère Edo, racontent une époque vierge de toute influence étrangère, en pleine effervescence artistique et culturelle. 

Organisée par thèmes, on y retrouve des paysages, des animaux en mouvement, des portraits de courtisanes, des scènes érotiques, ainsi que des scènes de la vie quotidienne... Envol d'oies sauvages, montagnes vénérées vues depuis la maison de thé, femme s'enroulant d'une étoffe, c'est toute la poésie et l'art de vivre de l'époque Edo qui est immortalisée au travers de ces estampes. Quelque chose de profondément contemplatif et d'apaisant s'en dégage. Peut-être dans la beauté, l'équivoque de ses scènes choisies, mais aussi son traité simple, épuré, la texture du lavis se sentant sur le papier.

Pour ma part j'ai été fascinée par les tons de bleu des estampes d'Hokusai, devant lesquelles j'aurais pu rester plantée de nombreuses heures, malgré le brouahaha ambiant.
La scénographie, pensée en tant qu'immersion dans ce monde flottant, ajoute à la collection objets traditionnels et tirages photo d'époque. Pour ma part j'ai été saisie, mais vraiment saisie de reconnaitre sur un grand tirage photo d'un groupe d'acteurs de Kabuki l'allure caractéristique des Power Rangers...

Plus jeune, j'ai longtemps été fascinée par les estampes japonaises. Irrésistiblement attirée par les livres, carnets et étoffes qui les représentaient, je ne me lassais pas de m'en extasier et les collectionnais moi aussi timidement. Une décennie plus tard, il se trouve que j'ai eu la surprise de croiser à Caumont un bon lot de ces images que je connaissais, ce qui me fait me dire qu'in fine il n'en existe pas tant que ça, des estampes japonaises.





Toujours est-il qu'une petite particularité est à noter pour cette exposition.
Sous couvert de fragilité des estampes, Caumont n'expose pas les plus connues en continu et les propose en rotation. Lors de votre visite, vous ne pourrez donc n'en voir qu'une seule des trois. Car un ticket d'entrée n'est valable que pour une seule visite et à moins d'être extraordinairement passionné, payer trois visites commence à peser dans le budget.

Voici le calendrier des dates de rotation des estampes :

L’Envers de la grande vague de Kanagawa d’Hokusai : du 8 au 21 novembre puis du 8 au 22 mars
Pluie fine au sommet du mont Fuji d’Hokusai : du 22 novembre au 15 janvier
Averse soudaine sur le pont Shin-Ohashi et Atake d’Hiroshige : du 16 janvier au 7 mars 


Je ne peux que recommander cette majestueuse et délicate exposition qui fait voyager au pays du soleil levant. J'ai trouvé qu'elle était particulièrement apaisante et quel plaisir d'aller à sa sortie se poser dans le boudoir, déguster un thé sencha avec une pâtisserie japonaise, créations spéciales autour de cette exposition.

Nouveauté cette année, Caumont s'est ouvert à tous ! Il est désormais possible d'accéder à la boutique, aux jardins et aux salons-boudoirs sans payer le prix d'entrée de l'exposition si l'on ne souhaite pas la visiter. La carte d'adhérant à l'année (50€...), droit d'entrée sine qua non auparavant n'est désormais plus nécessaire !



Hokusai, Hiroshige, Utamaro, les grands maitres du Japon  
Hôtel de Caumont, Centre d'art 
Du 8 novembre 2019 au 22 mars 2020

- Une des plus grandes collections privées d'estampes japonaises dévoilée à Aix {ici}

- Hokusai, Hiroshige, Utamaro… à L’Hôtel de Caumont – Aix-en-Provence {ici}