Une nuit au château de Picomtal, parenthèse enchantée dans les Hautes Alpes

11 juil. 2022





En Mai dernier, on s'est offert une nuit dans un château. Un vrai de vrai, avec un donjon renaissance et un air de château de contes de fées de nos livres illustrés d'enfance. Niché dans un écrin de verdure des Hautes Alpes, au pied des montagnes, non loin d'Embrun, le château de Picomtal est très discret. On le distingue à ses tourelles qui dépassent, saisissantes de beauté dans le paysage, qu'on aperçoit dans les hauteurs depuis cette route nationale qu'on a souvent pris ces dernières années.  

Le château séduit d'abord par ses consonances. "Picomtal" tiens, si ça c'est pas médiéval vieux français, rien ne saurait l'être. Etrangeté de ces sonorités d'un autre temps, rêve d'enchantement d'une autre époque. 

Il y a peu de châteaux dans les Alpes, et celui-ci me semblait de loin le plus intrigant. J'attendais une occasion un peu spéciale pour l'aborder, un événement à souligner, quelque chose à célébrer, histoire de se créer des beaux souvenirs. 
Nous avons finalement opté pour une célébration de notre passage dans la décennie suivante, post apocalypse covid 19, avec ce goût de retrouvailles Marseille-New York. 








Ce qu'on a aimé dans ce week-end, c'est cette explosion des sens. La vue sur les montagnes, le calme des jardins, la pureté de l'air, la beauté des vieux meubles, la douceur des étoffes, l'enchevêtrement de style et de couleurs, tout concourrait au plaisir des sens.

Le château de Picomtal ne se visite pas, enfin pas vraiment. Ancienne demeure féodale, il s'est aujourd'hui mué en chambre d'hôtes de délicatesse et de charme. Ses hôtes, un couple franco-américain ayant acquis le château à la fin des années 90, l'ont métamorphosé à grand coup de rénovation, ne laissant rien au hasard dans les détails de ses finitions. 

Le château ouvre ses portes dès la fonte des neiges, généralement au mois de Mai. L'hiver, Picomtal entre en hibernation, il fait trop froid, le château est fermé aux visiteurs, sans doute par soucis de risque et d'économie du point de vue du chauffage. 

Ce qui est bien, c'est qu'ici rien n'est touristique. Il est peu connu ce château et n'attire pas les foules. Dans une idée d'écrin de calme et de beauté, Picomtal aime à se glisser dans l'anonymat, se préserver de l'afflux des visiteurs.  

Par soucis de commodité, le château demande à ce qu'une réservation s'étale sur un minimum de deux nuits, ce qui n'est pas forcément à la portée de toutes les bourses. Comme on était quatre, on a demandé s'il était possible de reserver 2x une nuit, et contre toute attente, notre demande à été acceptée. 

Fin Mai 2021, la saison se libère à peine des restrictions du covid, et nous sommes parmi les premiers à réinvestir les lieux. Un seul autre occupant séjournait en même temps que nous, que nous n'avons pas croisé d'ailleurs. 

Du fait de cette chance, nous avons donc pu choisir nos chambres selon notre bon vouloir, nous promener dans les corridors à satiété, avoir un aperçu de la décoration de toutes les autres chambres du château.  

Pour ce séjour, nous avons choisi la Suite Louis XVI ainsi que la Chambre des accouchements, bien que notre préférence se soit portée sur la seule chambre occupée, celle de L'illustre inconnu.




















C'était grisant, de se retrouver au beau milieu de ce lieu magique où tout n'est que calme, luxe et volupté. Une sorte de saut dans le temps, au sein d'un ailleurs rare et éblouissant. Plusieurs salons, des recoins à découvrir, bibliothèque, piano, verrière et cheminées... 

Nous, françaises jusqu'au bout des ongles, on a adoré ces heures entre ses murs, des rêves de comtesse et de duchesse plein les yeux. L'american boyfriend toujours aussi new yorkais n'a pas nécessairement été réceptif au charme vieille europe, plutôt prompt a chercher  le wifi  d'où venait le bruit du parquet qui craque. I think it's a ghost... 

Côté restauration, la maison n'assure que le petit déjeuner, servi dans un superbe petit salon et franchement délicieux. Parce qu'ils sont plutôt très gentils, nos hôtes nous ont recommandé la table d'un restaurateur du village d'à côté, de bons amis à eux. La route jusqu'à Baratier, un peu tortueuse, ne prend que cinq minutes en voiture et l'on trouve facilement l'enseigne Les peupliers, un restaurant, mais aussi un hôtel spa. Il s'agit d'un gastronomique, fantastiquement bon et extrêmement copieux, qui nous a régalé de ses nombreuses farandoles d'amuses bouches entre les plats. A l'ombre de sa terrasse, un soir de pluie avec couvre feu, les conditions n'étaient pas réunies pour un moment divin mais il n'a pas manqué de l'être. 

La nuit aura été courte, on aurait préféré rester éveillés, profiter plus longtemps du lieu. Dans les Alpes, il n'y a pas les lumières de la ville, tout est plongé dans le noir, le vrai noir, une sensation si peu familière. A la fenêtre, l'argent d'un rayon de lune et dans le couloir, l'oranger d'une lueur fantomatique. Parce que tout petit salon dans une chambre mérite une tasse de thé, j'ai descendu les escaliers à la recherche de la bouilloire laissée en libre service au rez de chaussée. Cette expérience, seule dans les couloirs où le parquet craque et où les meubles se parent de formes inquiétantes, je m'en souviendrai longtemps. Tout comme de la beauté des premières lueurs de l'aube depuis la verrière. Deux sensations nouvelles que j'emporte avec moi.









Mon seul regret aura été de ne pas avoir pu rester plus longtemps. Avec les obligations typiques du créneau d'arrivée 16h / créneau de départ 11h - rageantes pour les visiteurs- ça ne laisse pas beaucoup de temps pour profiter des lieux. Mais dussé-je y passer une semaine, je crois que je n'aurais toujours pas trouvé le temps suffisamment long. 

Le matin de notre départ, nos hôtes nous ont passé un petit film, celui de la rénovation du château. Un véritable chantier, travail de titan, avec notamment la rénovation des poivrières, impressionnant à voir.

Petite particularité d'ailleurs notable qui nous a, je ne comprends pas pourquoi, été passée sous silence. Lors de la rénovation du château, une merveille, trésor inestimable de notre histoire a été découverte sous les lattes du parquet : le menuisier ayant posé ce plancher 130 ans plus tôt, s'était amusé à se servir du bois comme d'un journal intime, y ayant gravé détails inestimables de sa vie et de celle des habitants du village et de la vallée, faisant de ces écrits un des rares témoignages des us et coutumes de la paysannerie alpine du 19ème siècle. Un livre y est consacré aux éditions Belin, Le plancher de Joachim : l’histoire retrouvée d’un village français par Jacques-Olivier Boudon.



On a quitté le château un peu la mort dans l'âme. On y serait bien resté encore quelques jours, le temps de se perdre encore un peu dans le rêve d'une vie de châtelains, des souvenirs plein la tête de cette parenthèse enchantée.  

On s'est dit qu'on y reviendra, dans ce château. Peut-être pour fêter un autre événement, ou tout simplement pour le plaisir, pour la douceur de s'offrir sans raison un beau cadeau made in les Hautes Alpes. On s'est dit aussi qu'offrir un séjour à Picomtal peut être une superbe idée pour un anniversaire, aussi. 


















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