Road trip d'hiver en France : sur les traces des stigmates de Verdun

20 avr. 2020






J'ai toujours voulu voir Verdun. Parce que ça me semblait si lointain. Vestige d'une sale époque, la plus moche, la plus bouchère qu'ait connu l'histoire de France. Je voulais voir comment, par la magie du paysagisme, on avait pu transposer de la beauté comme de la poésie sur une terre aussi durement marquée par cette ignoble bataille. Je voulais savoir ce que je pouvais ressentir en foulant ce sanctuaire.

La bataille de Verdun, c'est la bataille phare de la Première Guerre Mondiale. Elle aura duré 10 mois au cours desquels les deux armées s'affrontent pour récupérer quelques mètres, causant plus de 700 000 victimes.

Véritable cimetière à ciel ouvert, cent ans plus tard on y déterre encore régulièrement des ossements, des objets, et parfois même des obus encore amorcés.

Curieuse coïncidence, à quelques jours près, je foulais les lieux le jour du centenaire de la bataille de Verdun...

La visite à Verdun fut très rapide. Le ciel est noir, la pluie glacée, les routes sinueuses, les hôtels complets : et pour cause, le centenaire... Nous nous sommes donc focalisés sur l'attraction principale de la ville : l'ossuaire de Douaumont.

L'ossuaire se trouve à 20 min au nord de Verdun, à Douaumont, village détruit, le long de routes qui serpentent, dans la forêt. Le monument se dresse, impérial, au beau milieu d'un champ de croix blanches. Les dimensions sont gigantesques. La tour de l'ossuaire se monte et se visite. Il en va de même pour ses arcades.

Cheville oblige, je n'ai pas vraiment pu marcher entre les tombes. Ni visiter l'ossuaire
Pardon, j'aurais voulu lire tous vos noms, messieurs les soldats à qui l'ont doit tant.

La visite est trop rapide pour que je puisse saisir toute l'ampleur émotionnelle du lieu. Au contact des stèles blanches, un sentiment timide et flou de gratitude prend naissance, bien en deçà de ce que je devrais ressentir, mais mon cerveau n'a pas vraiment le temps de l'assimiler, tant mieux pour mes nerfs.






Je retiens de ce passage par l'ossuaire de Douaumont une immense impression de paix. L'air est frigorifique, la pluie fine, mais gelée, le paysage calme et reposant. Le gigantisme ( clique ici pour en prendre la mesure ) impose le respect. C'est un bel hommage que la France a su rendre à ses enfants morts pour la patrie.

Le paysage lunaire, fait de cratères d'obus, tu peux facilement le percevoir. Il y en a un, proche de l'ossuaire. Avec sa tourelle d'observation, ses pigments très verts et ses bosselures, c'est une image saisissante que je m'empresse de graver dans ma mémoire. 60 millions de tirs d'obus en moins d'un an sur les terres de Verdun...

Depuis la route, on aperçoit ce qui semble être une sorte de  tranchée. Je suis impressionnée. Si s'en est une, c'est très bas, une tranchée. J'imaginais ça bien plu haut, comme un rempart. Comment ont-ils pu se sentir protégés derrière ces centimètres de terre ?






Il paraitrait qu'un de mes arrières grand-oncles est mort à Verdun. C'est toujours un régal de l'apprendre à la sauvette au détour d'une conversation quelconque avec ta mère, qui s'étonne que tu ne le saches pas (en même temps, si tu me le dis pas...) parce qu'elle l'a répété des milliers de fois depuis longtemps (ouais, dans ta tête). J'aurais aimé le savoir plus tôt. Je me sens naïve et stupide de ne m'être jamais dit que statistiquement, oui, j'ai forcément des ancêtres qui ont fait la Première Guerre Mondiale.

Pour ce Tour de France, on aurait bien voulu voir la ligne Maginot, aussi. Vestige et superposition d'une autre guerre dans une région qui dut la subit par deux fois et ce, plus durement que les autres. Mais c'était un peu trop nordique pour notre itinéraire déjà très chargé.

Toujours est-il que Verdun aurait mérité de s'y attarder bien plus longuement. Je pense qu'il refera l'objet d'un prochain voyage, en pleine santé cette fois-ci. Et puis ça fera peut être plaisir à Pierre-Marie Blanchard, blessé à Menil sur Belvitte, que sa descendance indirecte aille fleurir sa tombe...

A noter qu'un ossuaire c'est un immense caveau de fragments de corps qu'on n'a jamais pu ni reconstituer ni identifier. Que la bataille de Verdun c'est presque un million de victimes, qu'on en a pas enterré la moitié à l'ossuaire de Douaumont ni ailleurs, et que des centaines de familles, coté français comme côté allemand, n'ont jamais su et ne sauront jamais ce qu'il est advenu de leurs fils.





- le Mémorial de Verdun
- les couloirs du Fort de Douaumont
- le Fort de Vaux
- la Tranchée des baïonettes
- la Citadelle souterraine
- les ballades dans les forêts pour tomber sur les Casemates et monuments perdus dans la nature
- un gars qui parle très bien de son voyage à Verdun : {ici} 



- Apocalypse Verdun
- Verdun, un magnifique tableau de Valotton : {ici}
- Un long dimanche de Fiançailles de Sébastien Japrisot, et/ou son adaptation cinématographique éponyme réalisé par Jean-Pierre Jeunet
- Une belle archive, lettres et récits de René Prieur, un article Le Monde : ici
- Soldats Inconnus, un sublime jeu video que je m'emploierai bientôt à chroniquer, disponible sur l'appstore : ici
- Deux jolis courts métrages : A ses enfants, la patrie reconnaissante de Stephane Landowski et Lettres de femmes d'Augusto Zanovello
- Génération 14-18 : cinq photographes racontent leur périple à la rencontre de jeunes européens vivant sur d'anciens lieux de bataille de la Première Guerre Mondiale : ici